ALBON



Lacroix : Statistiques du département de la Drôme 1835



ALBON



ALBON (Castrum Albonis). - C'est l'antique château-fort où se réfugièrent les comtes de Graisivaudan, quand les Sarrasins s'emparèrent de Grenoble, en 732. Lorsque l'évêque Isarn parvint à chasser ces Barbares, en 967, les comtes de Graisivaudan quittèrent le château d'Albon pour retourner à Grenoble, où ils s'opposèrent à la souveraineté qu'Isarn voulut, par droit de conquête, s'attribuer sur leurs terres. Le nom d'Albon leur était devenu si cher, qu'ils le préférèrent à celui de comtes de Graisivaudan ; ils l'égalèrent même à celui de comtes de Vienne qu'ils acquirent dans la suite.
Bâti sur une éminence et entouré d'épais remparts, ce château, autrefois place importante, est dans le site le plus agréable qu'on puisse voir : le fleuve du Rhône serpentant dans une longue direction, beaucoup de bourgs et de villages qui couvrent la plaine de distance en distance, et plus loin, au-delà du fleuve, les montagnes du Vivarais, forment l'aspect le plus varié et le plus imposant. Une des tours subsiste encore, mais tout le reste ne présente que des décombres et des ruines. Tout semble annoncer que le château était entouré d'habitations à une assez grande distance. Les antiquaires ont cru long temps y retrouver l'ancienne Épaone, où se tint, en 517, un concile sur la discipline ecclésiastique, convoqué et présidé par Saint Avit, archevêque de Vienne ; mais c'est évidemment une erreur : Épinouze, hameau de la commune de Moras, est l'ancienne Épaone.
On continue de donner le nom d'Albon à cette commune, qui se compose de plusieurs villages ou hameaux, dont la population réunie s'élève à 2,663 individus. Les principaux sont Saint-Romain-d'Albon, situé au pied de la tour : c'est la résidence du succursal et le siége de la municipalité ; Saint-Rambert, qui forme la limite du département de la Drome avec celui de l'Isère, sur la grande route de Lyon à Marseille, à moitié chemin de Saint-Vallier au Péage-de-Roussillon, et Andancette, sur le Rhône, d'où l'on communique par un pont en fil de fer avec Andance et le département de l'Ardèche.
Des restes d'aqueducs, des vases antiques, des médailles et des fragmens de mosaïque trouvés à Andancette, attestent le séjour des Romains dans cette localité.
Dans ses Leçons élémentaires de numismatique romaine, page 246, M. de Pina mentionne une médaille de grand bronze, jusque-là inédite, trouvée à Andancette, et faisant partie de sa collection particulière. Elle est de Tetricus (C. Pius Esuvius Tetricus), fils du gouverneur de l'Aquitaine, à qui le sceptre des Gaules fut déféré après la mort de Postume et de Victorin, créé César par son père vers l'an 268, et qui, avec lui, se soumit à Aurélien en l'année 273. D'un côté, elle représente la tête nue de Tetricus, avec cette légende :
C. PIVS. ESVVIVS. TETRICVS. CAES.
De l'autre côté, elle représente Apollon ou le Soleil dans un quadrige, élevant un globe de la main droite, et tenant de la gauche un sceptre ou un fouet ; elle porte en légende :
AETERNITAS. AVGG.
Dans les environs d'Andancette, et très probablement au pont de Bancel, était la station romaine indiquée dans les Itinéraires sous le nom de Figlinoe. C'est en creusant les fondations du pont qu'a été découverte une des colonnes milliaires qui existent dans les jardins de la préfecture, et dont l'inscription est rapportée à l'article Valence.
Un monument tumulaire a été trouvé à Andancette en avril 1818 ; il a 3 pieds de hauteur sur 15 pouces de largeur. On remarque la place du bassin destiné aux libations, ainsi que les plombures latérales des clous auxquels on suspendait les guirlandes ou feuillages. L'ascia et les lettres sont bien conservées ; elles ont la forme de l'écriture romaine du IIme siècle.
D M SELI. SEXTA E. ALCIVS. SA BINIANVS. CO NIVGI. INCOM PARABILI. QVAE VIXII APVD EVM ANNOS XXIII. M. V DIES XXI. P. CVRA VIT. ET SEXTINVS FRATER EIIVS. SVB ASCIA P. VNT.
Aux Dieux Mânes. Alcius Sabinianus à Selia Sexta, épouse incomparable, qui a vécu auprès de lui vingt-trois ans cinq mois vingt et un jours. Cette pierre a été posée par ses soins et ceux de Sextinus, son frère.
Albon est situé à 10 kilomètres de Saint-Vallier et à 42 de Valence. Son territoire, que traverse du nord au midi la grande route, et que le Rhône longe à l'ouest dans la même direction, a plus de 2 lieues de rayon. Ses productions principales sont les grains, les fourrages et la soie.
On trouve, au bas et au midi de la tour d'Albon, des carrières d'une espèce de grès tendre, facile à tailler, durcissant à l'air, et très bon pour les bâtimens. On l'a employé avec succès dans la construction du pont de Bancel. Le territoire renferme aussi une assez grande quantité de pétrifications, parmi lesquelles on distingue des bancs considérables d'huîtres sur les points les plus élevés.
C'est près de là, dans le village de Claveyson, qu'est né, en 1705, Alexis Fontaine, membre de l'académie des sciences, des académies de Dijon, Berlin, etc., mort en 1771, et sans contredit l'un des mathématiciens qui ont le plus contribué au progrès des sciences exactes. Sa famille habite le village d'Andancette.
On trouve aussi à Saint-Romain-d'Albon et dans les environs des descendans de Barthélemi de Laffumat, natif de Beausemblant, contrôleur général du commerce sous Henri IV, et auteur de plusieurs écrits depuis long temps oubliés.

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